L'oiseau qui se consume mais jamais ne se meure ...

La personnalité de Vayentharaedan … à la fois simple et complexe.
Au premier abord, il s'agit d'un homme assez facile à vivre, qui ne demande jamais rien à personne, car parfaitement capable de se débrouiller par lui-même. Calme, placide et réfléchi sont des adjectifs qui le qualifierait à merveille, bien qu'il lui arrive aussi de faire preuve de légèreté, n'hésitant pas à se mêler à une ambiance festive si le cœur lui en dit. Cependant, gare à vous si vous vous avisez de lui demander un service … Sous son air facile à vivre, il est parfaitement capable de faire preuve de cynisme, et il pourrait tout aussi bien réellement vous aider tout comme il pourrait choisir d'interpréter votre requête selon son bon vouloir et, de fait, à votre désavantage. Dans ce genre de situation, il n'est pas aisé de prédire son comportement.

Par conséquent, si on lui demande s'il est plutôt du camp du bien ou du mal, il se situera plutôt comme étant 'neutre'. Il ne prend pas part directement à ce conflit, et se contente d'observer de l'extérieur … en apportant parfois son aide. A l'un comme l'autre des camps.

Il éprouve une réelle affection pour les êtres humains, qu'ils soient originaires du monde des contes ou de celui des humains, mais d'un autre côté, il a développé un penchant prompt à la destruction et à la pyromanie : certains feux semblant profiter au mal ne sont pas forcément anodins … Mais cette tendance destructrice n'est que le moyen instinctif qu'il a d'extérioriser sa frustration.

Car Vayentharaedan est en effet quelqu'un qui est rongé par ses regrets. Ce qu'il ne laissera jamais personne découvrir. Et si d'aventure une quelconque personne venait à trop se rapprocher de lui, et commençait à suffisamment le connaître pour pouvoir lire entre les lignes, il fuira. Parce qu'il est parfaitement conscient que si quelqu'un venait à voir ce qu'il renferme au fond de lui, il pourrait soit être mené par le bout du nez, soit -si la personne l'apprécie- être poussé à se confier …

Et dans tous les cas il en ressortirait anéanti, une fois de plus. Et s'il sait qu'il ne sera jamais pleinement heureux, il tente à tout prix de préserver son maigre équilibre, déjà si fragile …

Physiquement, il me semble important de rappeler que l'apparence humaine de Vayentharaedan n'est pas celle qui a donné naissance au mythe qu'il incarne, mais celle dite de ''l'oiseau de feu''. Et pour cause : si dans l'allure, il ressemble à un pygargue à queue blanche, quoiqu'avec un corps un peu plus allongé, son plumage aux tons chatoyants peuvent s'enflammer soit sous le coup d'une émotion trop forte, soit dans un but pyromane précis, ou encore lorsqu'il se consume entièrement pour renaître de ses cendres. Mais les plumes les plus remarquables du pénix sont très certainement celles de sa queue, semblable à celles d'un faisan bien que nettement plus longues, et arborant toujours les mêmes nuances rouge-orangé et doré que sur le reste de son corps.
[Et parce que je sais que niveau description, on peut pas faire pire, je vous invite à vous représentez Fumseck, dans Harry Potter, mais sans la crête. C'est tout de suite plus parlant, non ?]

Mais à force de côtoyer les hommes, il a finit par apprendre à prendre forme humaine lui aussi. Et, pour une raison inconnue de lui-même, à chaque résurrection il prend une nouvelle apparence physique. Ainsi, certains ont pu, dans un passé lointain, le croiser en temps que blond, roux, brun, les yeux verts, bleus, noisette, et la peau plus ou moins claire, mais actuellement, Vayen porte une tignasse brune en bataille, laisse parfois une courte barbe apparaître sur son visage, et ses iris sont d'un bleu clair limpide.

Sa stature reste quand à elle plus ou moins identique : du haut de son mètre quatre-vingt passé, c'est quelqu'un que l'on pourrait qualifier de bien bâti de naissance, bien qu'il prenne également soin de son corps : ce n'est pas parce qu'étant une créature magique, il est naturellement bien proportionné, qu'il se laisse aller à la paresse la plus totale, au contraire ! Il supporte mal l'inactivité, qui est généralement le premier pas vers des réflexions qu'il préfère éviter, et est de toute façon féru d'escalade et de randonnée : de plus, devoir passer d'une forme à une autre lui demande une quantité d'énergie non-négligeable, et le vol n'est pas non plus une activité peinarde.

Si son plumage en tant qu'oiseau ne passe pas franchement inaperçu, ses tenues vestimentaires sont nettement plus sobres : tout lui convient, tant qu'il s'agit de vêtements simples et confortables, peu importe le monde dans lequel il se trouve. Puisqu'il reste rarement immobile, autant qu'il puisse se mouvoir tranquillement … Le seul élément récurent dans sa tenue est un pendentif argenté représentant un phénix qu'il avait offert à sa belle et dont il ne se séparait désormais plus …

Ce collier ainsi que certains tics, comme celui de siffler entre ses dents lorsqu'il est agacé, ou de pencher la tête de temps à autre, sont les seuls signes qui pourraient trahir sa véritable nature … car il n'est pas suffisamment imprudent pour utiliser ses flammes devant témoins, et qui irait prêter attention à cette couleur de braise qu'ont ses pupilles ?

Retracer des siècles d'existence étant une tâche relevant de l'impossible, je m'en vais seulement vous conter les grandes lignes de la vie de Vayentharaedan …

Il faut tout d'abord savoir que personne ne sait comment il est né, ni où exactement. Certains le disent originaire du continent asiatique, d'autres de Perse, d'autres encore d’Égypte : à force de voyages, cet oiseau légendaire a parcouru le monde entier, mais le pays dont il se sent le plus proche reste celui de la Mère Patrie. Il s'est en effet toujours senti proche de la Russie, pour une raison ou pour une autre.  Peut-être était-il bel et bien né là-bas ? Lui-même l'ignorait, n'ayant que des souvenirs très flous de son enfance dans sa toute première vie. Mais s'il y a bien une chose dont il est certain, c'est qu'il n'a jamais eu de parents. Pourtant, il avait beaucoup observé les hommes et les oiseaux, ainsi que toutes les autres créatures vivantes : chaque spécimen avait au moins un parent … Alors, pourquoi pas lui ?

Le phénix savait qu'il était différent depuis sa naissance, car il avait très tôt remarqué que son plumage s'enflammait, mais ce n'est qu'un peu plus tard qu'il comprit à quel point il différait de tout autre être vivant, lors d'un événement qui allait se répéter de façon récurrente bien malgré lui : ses résurrections.

La première fois, il n'avait pas compris ce qui lui arrivait. Il sentait ses propres flammes dévorer son corps, tant de l'extérieur que de l'intérieur, et la seule pensée cohérente qu'il parvenait à dégager à travers la douleur qui le consumait était la certitude qu'il allait mourir. Mais étrangement, lorsqu'il rouvrit les yeux, il était dans un espace clos, de forme ovoïdale, et mit un certain temps à réaliser qu'il se trouvait dans un œuf. Et tandis qu'il perçait la coquille, des flashs confus du passé lui revinrent : pourquoi n'était-il pas mort ? Et … pourquoi avait-il un corps d'oisillon, alors qu'il avait déjà achevé sa croissance ?

Il mit un certain temps à accepter le fait qu'il pouvait renaître de ces cendres, et que lorsqu'il arrivait en fin de vie, son corps partait en flammes instinctivement. Il n'avait aucun contrôle sur cette faculté, mais il avait appris à contrôler ses flammes en temps normal et, avec le temps, il avait également développé le pouvoir de prendre forme humaine, pouvant se mêler aux hommes. De nature curieuse, il apprit de nombreuses langues et cultures, voyagea beaucoup, accumulant les connaissances d'une vie à l'autre. Il aimait bien les hommes, qu'il jugeait intéressants, et se lia même d'amitié sous sa fausse apparence avec quelques personnes. Mais d'un autre côté, les voir mourir en sachant qu'il ne les rejoindrait jamais s'il existait une quelconque forme d'au-delà … cela le blessait à chaque décès. C'est ainsi que, après plusieurs décennies, il décida de prendre ses distances, et passa plus de temps sous son apparence aviaire. Ce qui lui valu d'être pourchassé par certains individus désirant s'emparer de ses plumes ou en faire leur animal de compagnie. Souvent Vayen fuyait, passant du monde des hommes à celui des contes et vice-versa, parfois il tenait tête à ses détracteurs et les menaçait, voire attaquait. Et lorsque la rumeur se répandit selon laquelle il était immortel … d'autres vinrent encore, cette fois pour l'implorer de partager ce don avec eux.

Le terme de ''don'', de ''cadeau'', ou même parfois de ''bénédiction'' lui donnait toujours envie de rire jaune. S'il faisait face à des êtres orgueilleux, il ne se privait pas de leur donner une réelle immortalité, que ces mêmes énergumènes finissaient par ne plus pouvoir supporter et qu'ils fuyaient en se suicidant. Quand à ceux dont l'âme était pure, Vayentharaedan leur refusait cette demande et les poussait à prendre conscience du fait que la plus grande beauté de la vie résidait dans ce qu'elle avait d'éphémère. Ce principe était devenu pour lui évident, et c'est pourquoi il en était en quelques sortes venu à perdre le goût de vivre : mais jamais il n'avait trouvé le moyen de mettre un terme à ses jours et pouvoir enfin trouver le repos éternel. De quoi devenir fou.

Mais un jour, il retrouva ce goût de vivre grâce à une personne, dans le monde des humains. Une jeune femme.

Elle vivait dans un village au pied de la montagne où il avait élu domicile à l'époque. Elle l'avait vu alors qu'il se dégourdissait les ailes, et l'avait recherché par pure curiosité. Lorsqu'elle l'avait trouvé, il s'était tout simplement montré indifférent, l'ignorant superbement. Elle finit par partir, mais revint quelques jours plus tard et, trouvant l'étrange oiseau toujours présent, s'assit et … se mit à parler.

Elle parlait de tout et de rien, mais même ainsi … le phénix finit par être charmé par sa voix calme, douce et apaisante. Il finit même par s'accoutumer à sa présence et à l'apprécier, se rapprochant d'abord, puis s'installant à côté d'elle et la laissant lui caresser les plumes. Sans même s'en rendre compte, il avait retrouvé l'envie de vivre, tout du moins lorsqu'elle était présente. Il n'avait pourtant rien demandé ! C'était elle qui s'était mise en tête de faire de lui une sorte de confident, alors qu'il ne lui avait jamais répondu … Mais d'un autre côté, il n'avait pas eu le cœur à la chasser non plus.

Un jour, il prit son courage à deux mains (ou plutôt exactement à deux paires de serres …) et lui fit part de sa vrai nature, et reprenant sa forme humaine devant elle. Ce qu'il espérait ? Il ne savait pas vraiment, mais il s'attendait soit à l'effrayer, soit à voir en elle cette étincelle qui annonçait que quelqu'un comptait l'utiliser. Et il ne s'était sûrement pas attendu à ce qu'elle le serre contre elle en murmurant des paroles apaisantes, ni à ce qu'il finisse par fondre en larmes.

Elle repartit une fois que Vayen fut calmé, et revint le lendemain. Et les jours qui suivirent. Chercher à se mentir aurait été parfaitement vain : il était tombé fou amoureux d'elle. Et même lorsque les mots et les gestes de la demoiselle prouvaient que le sentiment était réciproque, il ne pouvait s'empêcher d'avoir ce pincement au cœur lorsqu'elle rentrait chez elle à la tombée de la nuit.

L'amour rend aveugle, et même les créatures magiques sont concernées. Il s'était vu nourrir deux espoirs grâce à sa dulcinée, deux espoirs parfaitement infondés et irréalisables.

Le premier était né assez tôt dans sa tête : celui d'avoir une descendance. Cela pouvait paraître idiot, mais il jalousait ces couples, humains ou oiseaux, qui avaient cette chance inestimable à ses yeux de pouvoirs s'occuper de et chérir un enfant/poussin. Mais après avoir rencontré cette jeune femme, et surtout après qu'ils se soient donnés corps et âmes l'un à l'autre, ce souhait était devenu de plus en plus fort -il avait d'ailleurs fini par l'avouer à l'élue de son cœur.

Le second était entièrement lié à la demoiselle, et venait de la hantise qu'il avait enfin réussi à comprendre, au bout d'un peu plus d'un an qu'ils se connaissaient : elle était humaine, donc mortelle, et lui non. Ce qui signifiait que tôt ou tard, il finirait par la perdre. Ce qu'il refusait complètement. Il avait même tenté de la persuader de devenir immortelle, et ce fut elle qui lui rappela ce que lui-même disait d'habitude, qu'il fallait chérir la vie justement parce qu'elle n'était pas éternelle. Il admirait cette sagesse tout en la détestant : il aurait tant voulu qu'elle accepte … Mais elle pardonna facilement cette crise d'égoïsme, même s'il bouda comme un gamin pendant quelques minutes -il ne pouvait tout simplement pas lui en vouloir.

Il aurait pu tenter de faire taire sa tristesse et profiter du temps qui leur était accordé, mais parfois, le hasard -ou le destin, le sort, tout dépend du point de vue- se montrait souvent retors. Et c'est après 7 brèves années à vivre ensemble -Vayen ne pouvait pas envisager de se marier, pour des raisons on ne peut plus évidentes- qu'une maladie qu'il n'avait pas su remarquer emporta son amante en quelques jours. Celle qui l'avait compris, l'avait soutenu, qui était devenue sa raison de vivre. Disparue.

Personne n'avait jamais retrouvé son corps, et la période qui suivit fut un temps où de nombreux incendies ravageurs se succédèrent dans les deux mondes. Le phénix ne savait pas comment contenir cette détresse et cette douleur sourde en lui, mais finit -après plusieurs réincarnations assez rapprochées- par retrouver son calme, à défaut de pouvoir recoller les morceaux de son cœur brisé. C'est depuis lors qu'il se comportait comme aujourd'hui : assez facile à aborder, et en même temps terriblement distant.

Et lorsqu'il avait entendu parler de cette Alice, dont l'héritière avait été retrouvée dans un lycée … c'était tout d'abord par pure curiosité qu'il était retourné dans le monde des humains, où il ne passait plus que très peu de temps, et chercha un moyen d'en apprendre plus tout en se faisant discret, ce qui n'était pas trop compliqué avec la dégaine d'étudiant qu'il avait actuellement ...